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- Date 26 Avr 2018
- Catégorie Autres
A propos
L’obligation de négocier lors de la réunion du protocole d’accord préélectoral sous peine d’annulation des élections
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Un nouvel arrêt de la Cour de cassation, qui fera l’objet d’une publication au bulletin, rappelle que l’employeur est tenu à une obligation de négociation durant le processus électoral, dont la violation amène à une lourde sanction.
En l’espèce, un employeur avait enclenché le processus électoral dans son entreprise en convoquant les organisations syndicales intéressées à venir négocier. Cependant, il avait estimé que le syndicat SM-TE ne respectait pas aux exigences légales et n’était donc pas un partenaire de négociation. L’employeur avait ainsi refusé toute négociation notamment sur la répartition du personnel dans les collèges électoraux et des sièges entre les différents collèges. Or, il ressort du jugement attaqué que le syndicat SM-TE satisfaisait bien aux conditions légales prévues par l’article L.2314-3 dans sa rédaction applicable à la cause. Aussi, l’employeur ne pouvait refuser de négocier avec ce dernier et tenter de trouver un accord.
La solution peut toutefois paraître étonnante. En effet, l’article L.2314-11 alinéa 3 du Code du travail , dans sa version applicable à l’espèce, dispose que « lorsqu’au moins une organisation syndicale a répondu à l’invitation à négocier de l’employeur et que l’accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut être obtenu, l’autorité administrative procède à cette répartition entre les collèges électoraux conformément aux dispositions de la convention ou de l’accord prévu à l’article L. 2314-10 ou, à défaut d’un tel accord, entre les deux collèges prévus à l’article L. 2314-8 ». Ainsi, la seule présence du syndicat à la réunion de négociation du protocole d’accord préélectoral aurait dû engendrer la saisine des services de l’Inspection du travail pour que ces derniers procèdent à la répartition, origine du désaccord dans les faits de l’espèce. Au besoin, la décision de la DIRECCTE aurait pu être contestée devant le juge judiciaire. Dès lors, il aurait pu être imaginé que la haute juridiction sanctionne la défaillance de l’employeur qui n’a pas saisi l’autorité administrative.
Cependant, la Cour de cassation a souhaité rappeler que la mise en place des élections professionnelles est obligatoirement précédée d’une négociation, qui doit être effective, avec les organisations syndicales intéressées. Il s’agit des organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise ou l’établissement concernés, des organisations syndicales reconnues représentatives dans l’entreprise ou l’établissement, celles ayant constitué une section syndicale dans l’entreprise ou l’établissement, ainsi que les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel. Le non-respect de cette obligation de négociation est sanctionnée par une annulation automatique des élections dans la mesure où la Cour de cassation l’érige en principe général du droit électoral.
L’existence des principes généraux du droit électoral est visé à l’article L.2314-23, devenu L.2314-28 du Code du travail. Toutefois, ils ne sont pas énumérés et c’est donc la jurisprudence qui a eu la charge de les dégager. La seule violation de ces derniers justifiant l’annulation des élections indépendamment d’une éventuelle incidence sur l’issue du scrutin. En cela, ils s’opposent à d’autres causes d’annulation qui ne peuvent être retenues que si elles ont eu une influence sur le résultat du vote comme une clôture anticipée du bureau de vote (Cass. soc., 27 mai 1987, n° 86-60.360).
S’agissant de ces principes généraux, à titre d’exemple, il a pu être jugé que le défaut d’affichage informant le personnel de l’organisation des élections dans chaque site de travail est de nature à entraîner la nullité de plein droit du scrutin, y compris si les sites sont très nombreux (Cass. soc., 3 avr. 2002, n° 01-60.464). De même, il a été jugé que le défaut d’affichage de l’invitation des organisations syndicales à négocier le protocole préélectoral est une circonstance de nature à entraîner à elle seule l’annulation du scrutin (Cass. soc., 2 mars 2001, n° 10-60.201). Il en va de même de la présence, au premier tour, d’une liste présentée par un groupement n’ayant pas la qualité de syndicat (Cass. soc., 27 janv. 2010, n° 09-60.103).
Désormais, un nouveau principe général du droit électoral a été dégagé : celui pour l’employeur de rechercher un accord sur la répartition du personnel dans les collèges électoraux et des sièges entre les différentes catégories. Si l’arrêt de la Cour de cassation a été rendu sous l’empire de la législation applicable aux délégués du personnel, il ne fait aucun doute que la solution subsistera pour ce qui relèvera du Comité social et économique.